Féminisme et syndicalisme CGT, pratiques militantes et revendications dans le champ de l’Éducation, la Formation, la Recherche et la Culture Partie 1 - Le travail d’archives
P.3 - Présentation du colloque
Intervention de Pauline Schnegg, animatrice du « Collectif fédéral Femmes mixité » avec Sandra Gaudillère
P.5 - Le travail d’archives
Pratiques militantes et revendications des femmes dans le syndicat au prisme des archives du SNETP et de l’UNSEN, intervention d’Alain Vrignaud et Christian Hamon, membres de l’IHS-FERC
Présentation du colloque
Intervention de Pauline Schnegg, animatrice du « Collectif fédéral Femmes mixité » avec Sandra Gaudillère
Bonjour et bienvenue au colloque de l’Institut d’Histoire Sociale « Féminisme et syndicalisme CGT, pratiques militantes et revendications dans le champ de l’Éducation, la Formation, la Recherche et la Culture ».
Nous éprouvons une grande satisfaction à tenir ce colloque que nous avons dû reporter plusieurs fois à cause des différentes vagues de la pandémie. Nous sommes donc aussi particulièrement contentes et contents d’être là, ensemble, présentes et présents aujourd’hui.
Le thème de cette journée a été proposé par les camarades de l’IHS de la FERC et travaillé dans le cadre de réunions communes entre les membres de l’IHS fédéral et des membres du collectif femmes mixité de la FERC, que des camarades de la Collective de la CGT éduc’action ont rejointes pour l’occasion. Cette journée d’étude est donc le fruit d’un travail collectif de longue haleine et nous tenons à remercier celles et ceux qui de près ou de loin s’y sont associé·es.
Nous avons toutes et tous éprouvé beaucoup de plaisir à le préparer ; notamment, aux dires des camarades concernées, à se plonger dans les archives, à fouiller pour essayer de comprendre les motivations des militantes, les tensions et les enjeux du militantisme syndical féministe dans notre fédération. Mais l’objectif de ces analyses de l’histoire s’inscrit dans une dynamique forte : nous voulons nous enrichir des expériences de nos camarades pour construire nos luttes et continuer avec toujours plus d’énergie à conquérir l’égalité réelle et l’émancipation de toutes et tous.
Si certains et certaines véhiculent l’image d’une CGT masculine, parfois viriliste, ce n’est pas seulement une légende. Le témoignage d’Hélène Brion, institutrice secrétaire générale par intérim du syndicat des instituteurs et membre du comité confédéral de la CGT au début du XX° siècle donne froid dans le dos :
« C’est en pleine grève. Les femmes grévistes et quelques hommes sont à la porte, veillant au débauchage et empêchant l’entrée des ouvrières trop timides pour faire grève, si on ne semble les y forcer. Aussi, on les « force » - aux rares qui viennent pour reprendre le travail, les gardes de la porte disent quelques mots, font le geste de défendre l’entrée et ça suffit : elles s’en retournent ou restent là à regarder aussi.
Et que voient-ils soudain, tous et toutes ? Une femme qui arrive pleurante, morte de honte, suivie par un homme qui, à coups de trique et de pied, la force à avancer… C’est une gréviste de la veille et de l’avant-veille que son tsar ramène au travail, parce que ça lui déplaît que sa femme fasse grève.
Et les chevaliers de la grève restent là, impuissants devant cet homme qui, sous leurs yeux, pousse la porte et, toujours cognant, pousse sa femme à l’intérieur du bagne…
S’il s’était agi d’un contremaître battant une ouvrière, tout le monde syndical aurait bondi ; mais c’était l’homme, affaire privée ! Question de ménage ! »
Heureusement, le féminisme est dès cette époque pris en charge par des camarades dans la CGT et, selon des vagues plus ou moins puissantes, leurs luttes sont productives, les femmes conquièrent des droits et les font et feront valoir jusqu’à ce qu’ils deviennent réalité. En effet, si l’égalité salariale entre les femmes et les hommes est un droit, ce n’est toujours pas une réalité.
De plus, les régressions sociales sont toujours menaçantes, et particulièrement quand l’extrême droite progresse, y compris parmi les sympathisants et sympathisantes de la CGT. Nous devons être toujours plus engagées et vigilantes quant aux droits que les femmes ont conquis, au travail et dans la société. C’est pour cela qu’avec l’adhésion et le soutien de toute la CGT, les collectifs Femmes mixité, dont celui de la FERC, la Collective de la CGT éduc’action, qui fête ses dix ans cette année, les cellules de veille contre les violences sexistes et sexuelles, nous exigeons que l’égalité des droits entre femmes et hommes soit réelle, ce qui implique souvent un rattrapage, que ce soit dans la CGT, au travail et pour toutes les avancées sociales.
C’est donc au tour de l’Institut d’Histoire Sociale de la FERC aujourd’hui de s’interroger sur le Féminisme et le syndicalisme CGT, sur les pratiques militantes et les revendications dans le champ de l’Éducation, la Formation, la Recherche et la Culture.
Comment la FERC de la CGT se nourrit-elle de son histoire et des luttes des femmes pour, aujourd’hui, continuer à construire l’égalité entre les femmes et les hommes ?
C’est ce que nous allons travailler ensemble avec le programme que je vais présenter maintenant.
Le travail d’archives
Pratiques militantes et revendications des femmes dans le syndicat au prisme des archives du SNETP et de l’UNSEN, intervention d’Alain Vrignaud et Christian Hamon, membres de l’IHS-FERC
Des revendications féminines... au féminisme
Nous avons effectué un travail de consultation des archives nationales du SNETP-CGT, Syndicat National de l’Enseignement Technique et Professionnel CGT.
Ces documents sont conservés aux Archives Départementales de Bobigny en Seine Saint Denis, département dans lequel se situe le siège national du syndicat.
Nous nous sommes également appuyés sur les documents que les membres de notre l’IHS ont portés à notre connaissance, je pense notamment à deux anciens secrétaires généraux du syndicat : Gérard Montant, excusé car il est en ce moment à l’étranger et à Michèle Baracat, présente parmi nous. À noter Michèle, élue en 1985, est la première femme à avoir dirigé le syndicat.
Dans cette première partie du colloque nous allons regarder l’évolution des revendications spécifiques des femmes dans notre fédération et la façon dont ces problématiques ont été abordées sur une trentaine d’années.
Les documents à notre disposition sont principalement ceux du SNETP, première composante de la FEN-CGT, fédération qui deviendra en 1982 la FERC.
La période examinée suit la création du SNETP, à la fin de la guerre en 44, jusqu’en 1985, date de la 5e et dernière « conférence femmes » organisée par celui-ci.
De syndicat national le SNETP se transformera en 1988, lors du congrès de Dieppe, en une Union nationale de syndicats départementaux (l’UNSEN). Cette Union Nationale adoptera en 2008 la dénomination que nous lui connaissons aujourd’hui de CGT Educ’action.
Après cette présentation il y aura une place pour un premier débat. Nous pourrons revenir sur les évolutions évoquées mais aussi sur l’intérêt pour le syndicalisme d’un travail d’histoire. C’est ce que réalise le réseau des IHS, l’IHS national... et je remercie de sa présence Gilbert Garrel président de l’IHS, les IHS fédéraux et les IHS territoriaux. Un travail important pour mieux comprendre les enjeux qui sont les nôtres aujourd’hui.
Les revendications des femmes salariées, et parmi celles-ci dans notre secteur les revendications des institutrices, existent depuis longtemps dans le mouvement ouvrier, dans le mouvement social, bien avant la création de la CGT en 1895.
Mais il faut le reconnaître, leurs revendications ont eu parfois bien du mal à se faire entendre, y compris dans le mouvement syndical !
Différents ouvrages d’historiennes et historiens, des thèses d’universitaires traitent de cette question.
Nous avons modestement limité notre champ d’exploration à une période beaucoup plus courte et n’avons pas mené un travail aussi approfondi que nous l’aurions souhaité, par manque de temps lié aux différents confinements.
Néanmoins nous avons pu trouver des documents mettant en évidence l’évolution dans la façon dont le syndicat avait pris en compte ces revendications.
Il existe dans cette période, en dehors du SNETP, un syndicalisme CGT dans le monde de l’Éducation, parmi les personnels techniques, de service ou administratifs, dans l’enseignement privé. De même, les revendications des femmes ont émergé dans d’autres organisations de la FEN-CGT ou dans la FERC, mais le champ exploratoire était trop vaste pour que l’on puisse l’examiner sérieusement. Nous avons choisi de centrer nos recherches sur les archives syndicales qui nous étaient les plus accessibles, celles déposées à Bobigny à partir de 1997. Ces archives couvrent une période allant de 1936 à 1998 et représentent à elles seules 60 mètres linéaires de rayonnage à Bobigny.
Dans la préparation de ce colloque nous avons pu mesurer toute l’importance d’une conservation correcte de nos archives syndicales.
Impossible de réfléchir, comme nous allons le faire aujourd’hui, à l’évolution des pratiques militantes et des revendications syndicales sans archives pour examiner avec rigueur ce qui se disait, s’écrivait, se votait il y a 70 ans.
Je laisse la parole à Christian qui va maintenant vous présenter la façon dont nous avons travaillé et vous donner quelques thématiques que nous avons pu relever.
Ce que révèlent les documents d’archives
Pour préparer ce colloque nous avons décidé de consulter des documents d’archives de la FERC. Tout de suite nous avons constaté à Montreuil le contre-exemple de ce qu’il faut faire : repérer les boites à archives avec des post-it qui tombent quand on claque la porte ! Mais rassurez-vous, ce n’est pas le cas aux archives de Bobigny où ont été déposées les archives du Syndicat. Nous espérons que cette présentation encouragera les camarades à suivre le stage d’initiation aux archives organisé chaque année par l’IHS national, stage qui nous a été très utile pour préparer cette intervention.
Notre première tâche a été de créer un espace de stockage en ligne pour réunir les documents numérisés, une réflexion est en cours avec la FERC pour gérer et rendre accessible les archives numérisées à l’occasion de ce colloque, et d’une manière plus générale, les archives de l’IHS et de celles des organisations membres de l’IHS. Avant d’aller plus loin, précisons que la FERC à acheter un matériel performant pour scanner les documents jusqu’au format A3. Ce matériel très simple d’utilisation peut être mis à disposition des organisations.
Les sources archivistiques que nous avons pu consulter sont nombreuses : presse syndicale ; documents de congrès ; tracts ; affiches, discours, analyses et commentaires ; documents universitaires ; textes officiels. Elles ont révélé des jalons historiques qui ont permis de mettre au jour les revendications et les pratiques militantes des femmes au sein du syndicat.
[...]
Lire la suite dans le document en pièce jointe !