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Non au brevetage-appropriation du vivant qu’il soit « naturel », « génétiquement modifié » (OGM) ou « édité » !

Certificat d’Obtention Végétale. Avec le COV adopté par la plupart des pays agricoles dès 1961, les sélectionneurs privés et publics se sont dotés d’un moyen de rémunérer le travail de recherche sans privatiser l’innovation tout en enrichissant les ressources génétiques au profit de tous. Les variétés sont ainsi reconnues et protégées durant un temps restreint (25 ou 30 ans selon l’espèce) mais n’importe qui peut les utiliser immédiatement pour en créer d’autres par croisements ou tout procédé efficace. Le produit de ce travail peut à son tour être évalué et recevoir un statut de variété, éventuellement reconnue par un COV. C’est le COV qui a permis le progrès génétique depuis 70 ans. Rien n’obligeait que les OGM (organisme génétiquement modifié) ou toute autre plante inventée soient « protégés » différemment. Mais les grands groupes de la semence (Bayer, Syngenta, Pioneer,…. ) s’emploient depuis plusieurs décennies à renverser ce système pour le remplacer par un autre qui permet de garantir totalement leur monopole. Leur outil est le brevet. L’avènement des biotechnologies assimilant les caractères héréditaires à des séquences d’ADN fut aussi celui du brevetage du vivant.

Brevet. Un brevet est un titre de propriété portant sur une invention. Ce titre confère à son titulaire un monopole temporaire d’exploitation (20 ans avant de tomber dans le domaine public). On comprend bien les appétits qui peuvent pousser à faire des recherches permettant plutôt le dépôt de brevets (exclusivement profitables à quelques-uns) que l’avancée des connaissances (profitable à tous).

Le vivant potentiellement brevetable ? L’article 3.2 de la directive européenne 98/44 sur la brevetabilité que la CGT-INRA a toujours dénoncé crée une catégorie de plantes à part (ie les OGM) et stipule qu’ « Une matière biologique isolée de son environnement naturel ou produite à l’aide d’un procédé technique peut être l’objet d’une invention, même lorsqu’elle préexistait à l’état naturel ». C’est entre autres grâce à cette directive, qu’un OGM devient brevetable et donc potentiellement beaucoup plus rentable qu’une variété protégée par le COV, principalement du fait du caractère d’exploitation exclusive intrinsèque au brevet… si ce n’est que la règlementation en vigueur concernant ces plantes en a beaucoup freiné le développement et l’exploitation en Europe. Pour être brevetable-rentabilisable, nous l’avons vu, il faut qu’il y ait invention. Seule une plante « inventée » mais qui ne soit pas classée comme OGM (avec les restrictions que cela induit) serait donc intéressante à développer. Un OGM qui ne soit pas vraiment un OGM…

La récente apparition des plantes dites « éditées ». Le génome des plantes « éditées » est modifié mais sans insertion d’élément étranger. Les grands groupes semenciers espéraient donc faire entrer les plantes éditées dans le champ du brevetable : une nouvelle porte ouverte pour breveter et donc s’approprier le vivant, en s‘affranchissant des exigences de la réglementation sur les OGM ! Toutes les plantes « éditées » sont d’ailleurs aujourd’hui brevetées, notamment celles utilisant la technologie CRISPR-Cas9.

La position de la CGT-INRA. Pour la CGT-INRA, le principal problème posé par les OGM et/ou les plantes éditées réside dans le fait que ces organismes soient brevetés. Pour notre syndicat, le problème, c’est le brevet. Le brevet octroie à seulement quelques entreprises internationales le droit de sélectionner, de produire et propager des semences. La menace bien réelle, c’est que seuls quelques groupes dominent intégralement la production végétale.

  • C’est ainsi que depuis des années, la CGT-INRA demande qu’une loi interdisant le brevetage des connaissances en biologie soit votée au parlement français et que la directive européenne 98/44 qui a autorisé cette violation des principes élémentaires des brevets en les étendant aux connaissances sur les gènes, soit révisée.
  • C’est ainsi qu’elle a récemment également milité pour que ces nouvelles plantes dites « éditées » soient considérées au même titre que des OGM pour qu’en attendant d’abolir le droit de breveter le vivant, elles soient sous le coup des mêmes réglementations contraignantes que les OGM, ou bien que leur exploitation soit couverte par le COV.
  • Dans tous les cas, la CGT exige que les méthodes d’obtention soient déclarées et transparentes pour que l’ensemble des acteurs des filières de production végétales mais aussi les consommateurs soient totalement informés, ce que refusent encore les détenteurs de brevets sur le vivant.

25 juillet 2018 : plantes « éditées » = OGM.  La Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) vient de décider, après de longs mois de réflexion et malgré l’intense lobbying des sociétés semencières transnationales, de ranger les plantes « éditées » dans la catégorie des OGM. Cette décision qui permet d’assimiler les plantes éditées à des OGM n’affecte en rien les recherches qui ont pour but le progrès des connaissances, leur mise à disposition de tous et la satisfaction des besoins sociaux. Elle n’empêche pas la production ni l’étude de plantes éditées tant en conditions de laboratoire que dans des essais au champ dans des buts de connaissance, mais exige simplement que cela soit déclaré et transparent. Cette décision n’empêche pas non plus la protection par un COV des variétés qui contiennent des plantes éditées. En revanche, elle ne change rien au problème du dépôt de brevets qui reste entier par rapport à la mainmise de quelques-uns sur le « vivant ». Pour la CGT-INRA, les produits végétaux semés dans nos campagnes devraient tout simplement être soumis au droit des variétés, ce que permet le COV…

Mais les sociétés privées, poussées par leurs actionnaires, ne soutiennent malheureusement les recherches que si le retour sur investissement, garanti par le monopole d’exploitation des produits que confèrent les brevets, est élevé. C’est précisément la soumission des laboratoires publics à cette logique privée qui est un frein considérable au progrès. Que ce soit via le Plan d’Investissements d’Avenir (Breedwheat, Amaizing, et autres Genius…) ou via les contrats européens, des millions d’euros publics pour la recherche n’ont été obtenus que par la caution des entreprises privées associées qui contrôlent tous les droits de diffusion des progrès scientifiques et techniques issus de ces programmes. Dès lors que les connaissances ou les organismes vivants produits sont brevetés, et que la compétition entre les équipes enrôlées dans les guerres commerciales entre les grands groupes, l’emporte sur la coopération scientifique, l’efficacité sociale de l’investissement public pâtit gravement.

C’est ainsi que la CGT-INRA réaffirme que seul un financement de base des laboratoires de recherche publics, un financement suffisant , récurrent et non conditionné par un quelconque soutien des groupes privés, garantit que la recherche publique réponde aux attentes sociétales, notamment, pour ce qui nous concerne, sur la transition écologique de l’agriculture. Un financement suffisant et des postes de fonctionnaires titulaires en nombre !
A ce sujet, la CGT-INRA invite chaque salarié de la recherche mais aussi chaque citoyen à signer la pétition « Un financement pérenne pour une recherche scientifique indépendante et de qualité »

Pour des ressources génétiques libres de brevets. Pour notre syndicat, la décision de la CJUE du 25 juillet dernier permet de gagner du temps mais reste encore insuffisante. Cette décision ne fait que renforcer notre demande de révision de la directive 98/44 CE sur laquelle reposent les brevets les plus iniques comme ceux portant sur les gènes associés à des caractères d’intérêt agronomique découverts chez les plantes mais sans aucune activité inventive. Le COV, dans sa version de 1961, est le meilleur compromis entre les différents acteurs de la filière végétale, des semenciers aux transformateurs en passant par les agriculteurs, puisqu’il garantit la liberté d’accès aux meilleures ressources génétiques que constituent les variétés elles-mêmes. Tant que cette directive n’aura pas été revue de fond en comble, la liberté d’accès aux ressources génétiques et, en définitive, la souveraineté alimentaire seront menacées. Il est plus que temps d’arrêter de faire miroiter aux petits agriculteurs et aux peuples du monde entier la chimérique possibilité de monnayer leurs ressources génétiques et de faire des affaires avec les entreprises de semences et de pharmacie, alors que le combat de notre XXIème siècle sera de redonner leur caractère de bien commun aux ressources naturelles.

La lutte pour la défense du principe du COV, qui permet de rémunérer correctement le travail de recherche sans privatiser le droit sur la génétique des produits, doit être plus résolue que jamais. La recommandation européenne unanimement votée par le Sénat (résolution E 8314 du 17/01/2014) doit être portée sans délai par la France auprès de la Commission Européenne pour libérer les ressources génétiques et dynamiser les échanges et le progrès génétique.

Avec la FNAF-CGT et les syndicats CGT des entreprises de semences, nous revendiquons également la création d’un office public des semences permettant de contrôler la qualité et l’accessibilité des meilleures semences au bénéfice de tous.

Pour tout contact : Jean-Louis DURAND, élu au CS INRA- tél : 05.49.55.60.94

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