Droits, Libertés et Action Juridique

 Les défenseur·es syndicaux ne sont plus limités à une région

 

Décision du Conseil d’état sur la compétence territoriale des défenseur·es syndicaux

La fédération nationale des syndicats du spectacle, du cinéma, de l’audiovisuel et de l’action culturelle CGT a attaqué la disposition issue du décret n° 2016-975 du 18 juillet 2016 et inscrite dans l’article D. 1453-2-4, qui limitait la compétence du/de la défenseur·e syndical au ressort de la Cour d’appel de son domicile ou du lieu de son exercice professionnel.

La FERC est intervenue au soutien de l’action de la Fédération du spectacle et a été admise dans son intervention.

Le Conseil d’État, dans une décision du 17 novembre 2017, annule cette restriction. Ceci permet aux défenseur·es syndicaux de se présenter devant tous les conseils des prud’hommes et toutes les cours d’appel du territoire français.

Il s’agit là d’une belle victoire pour la Fédération qui nous permet à nouveau de fournir une défense de qualité aux salarié·es des organisations fédérées de droit privé de la FERC.

Le Conseil d’État a considéré que les organisations syndicales ont fait valoir, à juste titre, et sans être sérieusement contredites, l’impossibilité à laquelle elles sont confrontées pour proposer, dans chaque région, des défenseur·es syndicaux ayant des compétences suffisamment variées pour assister et représenter les salarié·es y compris dans des branches présentant de fortes spécificités. Il en découlait une moindre spécialisation des défenseur·es syndicaux et des difficultés importantes en cas de déménagement ou de mutation d’un·e défenseur·e syndical en cours d’instance.

Le Conseil d’État indique que l’intérêt pratique d’un cadre régional, avancé par le ministère du travail, pour assurer :

  • la tenue des listes,
  • gérer le remboursement aux employeur·euses de la rémunération des absences des défenseur·es syndicaux,
  • prendre les décisions liées à la qualité de salarié·e protégé qui est reconnue aux défenseur·es,
    n’implique pas que l’on limite à une seule région l’exercice des fonctions de défenseur·e syndical.

La gestion régionale de l’inscription sur les listes de défenseur·es syndicaux aujourd’hui gérée par les unions départementales n’est pas remise en cause. On doit y voir, pour la CGT, une incitation à une meilleure coordination entre le niveau fédéral et le niveau interprofessionnel.

Le Conseil d’État rappelle qu’avant le décret du 18 juillet 2016, les salariés pouvaient faire appel au /à la défenseur·e de leur choix dans le cadre de la libre organisation des syndicats.

Enfin, les règles de la postulation (c’est à dire l’obligation d’avoir un·e avocat·e « local » qui assume les tâches administratives devant les juridictions pour un·e avocat·e d’un autre barreau) prévues par la loi du 31 décembre 1971 ne s’appliquent pas aux parties devant les conseils de prud’hommes et les cours d’appel statuant en matière prud’homale. Elles peuvent être assistées et représentées par l’avocat·e de leur choix quelle que soit sa résidence professionnelle.

Prévoir une dérogation à ce principe, seulement dans le cas où le/la salarié·e confie ses intérêts à un ·e défenseur·e syndical est une « une erreur manifeste de droit » censurée par le Conseil d’État.

Cette censure rétablit l’équité entre les salarié·es et les employeur·es qui, en y mettant le prix, pouvait s’adjoindre le concours de cabinets onéreux là où ils le souhaitaient.

Elle consacre le retour à une défense portée par des militant·es syndicaux, au fait des problématiques des salarié·es qu’ils/elles représentent, parce que partageant leurs conditions et réalités de travail. Elle permet, et ce n’est pas rien, qu’une défense syndicale appuyée par l’action syndicale et les revendications propres à chaque champ, soutienne une démarche de conquête des droits individuels et collectifs qui clairement cherchera à « faire jurisprudence ».