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 Bulletin IHS n°7

 

L’édito : il y a 40 ans

C’est en juin 1979 que se tenait à Levallois Perret (92) le dernier congrès de la FEN-CGT. Paul CASTEL, récemment disparu, en a été le dernier secrétaire général succédant à Jacqueline Marchand et il sera dans la nouvelle fédération, la FERC-CGT, son trésorier national. En décidant de la création de la FERC, les militant·es CGT ont voulu inscrire la continuité de leur combat entre deux fédérations syndicales, La FEN-CGT créée le 23 mars 1948 à Paris dont l’histoire était en partie liée à la création de la FEN « autonome » en 1947 et la nouvelle qui tournait définitivement la page de cet épisode.

Guy Dupre restera 6 ans premier secrétaire général de la « jeune » fédération. En 1982, le premier congrès de la FERC-CGT se tient à Tours.

Il y a 40 ans, la FERC était constituée de 19 syndicats nationaux dont l’activité était coordonnée en 4 secteurs de la Fédération : Enseignement, Recherche, Culture et Associations d’Éducation populaire (elle compte aujourd’hui 31 organisations dont plusieurs unions nationales de syndicats). La période est alors marquée par la victoire de François Mitterrand en 81 et lors de son premier congrès notre Fédération caractérisait le 10 mai « comme un évènement de nature à ouvrir une issue à la crise et à permettre de changer vraiment et durablement les choses dans notre Pays ; elle fait sienne les appréciations de sa Confédération CGT sur la nature du changement et les moyens à mettre en œuvre pour le réussir, en a précisé les conditions, pour ce qui est de sa responsabilité, dans les domaines de l’Éducation, de la Recherche publique, de la Culture et du secteur associatif ».

A l’ouverture du 13 ème congrès, il est intéressant de mesurer le chemin parcouru. Cela est possible en consultant les archives dont la conservation est menée conjointement par la fédération et son IHS. Il est de notre responsabilité de permettre aux futures générations de militant·es de pouvoir, demain, s’approprier leur histoire. C’est pourquoi il y a 15 ans la direction fédérale a décidé la création de son propre institut en l’inscrivant dans le réseau associatif de l’IHS national.

Connaître l’histoire de la FERC c’est aussi connaître celle de la FEN-CGT dont elle est issue. Connaître notre histoire c’est l’objectif que s’est fixé l’IHS en décidant, en accord avec la commission exécutive fédérale, la réalisation d’une exposition sur les luttes menées par la fédération et ses syndicats depuis sa création. C’est un travail important, passionnant et nécessaire. Le congrès permettra d’en mesurer l’avancée.

AFPA : une histoire qui doit se poursuivre !

L’AFPA tient dans notre fédération une place spécifique comme organisme de formation historique du champ de la formation professionnelle continue, perçue comme un élément immuable du service public. Avec un statut juridique associatif hier, EPIC aujourd’hui, elle est l’employeur de milliers de salarié·es de statut privé qui sont, à travers la CGT AFPA, des syndiqué·es de la FERC CGT. L’histoire de l’AFPA est riche, cet ouvrage, en restituant les travaux du colloque réalisé par la CGT en 2016, à l’occasion des 70 ans de sa création, le prouve.

La décision de publier ce livre (éditions Syllepse) a été prise par L’IHS avec l’accord de la CGT-AFPA et de la FERC. Son contenu permet de bien comprendre les enjeux d’hier en terme de formation professionnelle pour adultes pour mieux défendre ceux d’aujourd’hui. Ce livre est disponible en librairie (8€) mais vous pouvez aussi vous le procurer auprès des militant·es de la CGT-AFPA, de la FERC ou de l’Institut d’Histoire Sociale à un tarif préférentiel.

Catherine Hostalier nous a quittés

Catherine Hostalier nous a quittés le 27 juillet 2019. Comme le souligne une de nos adhérentes qui l’a rencontrée, « Je me souviendrai toujours de mon arrivée à l’ENNA en 1975. J’étais alors novice dans la lutte syndicale, mais on m’a dit « ce serait bien que tu te présentes aux élections pour le SNETP-CGT », et c’est là que j’ai rencontré Catherine, pionnière de la lutte syndicale, qui m’a alors épaulée et aidée à assumer mon rôle d’élue. Catherine était, pour moi, une personne de culture, une personne chaleureuse. J’ai su aussi que c’était un professeur aimé, car à l’époque elle était professeur dans un lycée près de Paris, et quand elle parlait de son travail, on sentait l’amour qu’elle portait à son travail, et elle nous le faisait partager. Malgré, les années, les faits et méfaits de la vie, Catherine fait partie des personnes que je n’ai jamais oubliées, qui ont marqué mon parcours de vie et ce soir, je l’avoue, même si c’est la vie, même si on vieillit, j’ai du chagrin (Isa Noblet) ». Nous reproduisons ce témoignage parce qu’il correspond bien à l’image que nous conservons de Catherine, l’enseignante, la militante, la femme. Catherine était le troisième enfant d’une fratrie de quatre. Ses parents étaient instituteurs. Des questions de santé lui firent quitter le lycée pour le CET où elle obtint trois CAP (comptabilité, secrétariat, employé de bureau), le brevet d’enseignement commercial et le brevet professionnel de secrétariat. Après plusieurs emplois comme comptable, secrétaire elle accéda aux fonctions de professeur d’enseignement technique théorique devenus plus tard des professeurs de communication et bureautique

Catherine Hostalier adhéra à la CGT (SNETP) en 1960 et fut élue aux conseils d’administration des divers établissements qu’elle fréquenta pendant 15 ans. Elle fut membre de la direction nationale du SNETP-CGT de 1968 à 1990, élue à la CAPN pendant quinze ans. Elle participa activement à l’activité de l’Institut de recherches sur les enseignements techniques et professionnels (IRETEP) créé par le SNETP. Elle fut présidente de l’Institut d’histoire sociale (IHS) de la FERC lors de sa création en 2007. Elle participa à l’activité du Groupement des retraités éducateurs sans frontières en qualité de déléguée de la région Ile-de-France pendant quatre ans.

Les Femmes et la CGT

L’égalité professionnelle, la place des femmes dans la société est un enjeu majeur des luttes sociales de plus en plus pris en compte par la CGT. En a-t-il toujours été ainsi ?

Un retour sur l’histoire permet de mesurer combien cette prise en compte a été un combat permanent. D’une présidence au congrès constitutif de la CGT en passant par les féministes de la CGT-U à la création d’ « Antoinette » accompagnée de différentes conférences des femmes salariées à aujourd’hui, cette lutte a connu de nombreux aléas.

Qu’en a-t-il été dans nos organisations ? Quelles actions spécifiques ? Quelles implications dans les initiatives confédérales ? Quel rôle a eu notre fédération de la FEN-CGT hier à la FERC d’aujourd’hui ?…

C’est le projet de travail de notre IHS pour les mois à venir. La création par « CGT’Educ » de « La Collective » a répondu à une nécessité ressentie par un collectif de militantes comme en écho à l’activité passée conduite pour défendre les revendications féminines sociales et/ou professionnelles des collègues de l’enseignement technique par le SNETP -CGT,(devenu CGT’Educ ) De quelle nature a été cette activité, quel a été son apport, quelles expériences en tirer pour les luttes actuelles ...avancées, difficultés voire échecs.

Cette activité identifiée dans l’histoire de CGT’Educ a existé sans nul doute, peut-être sous des formes différentes, dans les autres organisations de notre fédération. Qu’en a-t-il été ?

Nous faisons appel à vos recherches, contributions pour construire une initiative qui donne à voir l’histoire de notre fédération sur cette question sociale, enjeu pour demain.

Deux militantes, deux chemins, un même courage, une même espérance : Adrienne Montegudet, Jeanne Etheve

L’IHS veut travailler sur l’histoire de la CGT-U, dans la FEN-CGT. Les institutrices unitaires y ont joué un rôle important, y compris confédéral. L’article de Max Guillon présenté ci-dessous est un témoignage parmi d’autres, que nous vous invitons à rechercher dans vos départements et régions…

1922 : le syndicat des mineurs de Lavaveix décide, avec des organisations de cheminots, de lignards des PTT, des ouvriers du bâtiment et quelques autres cégétistes, de rejoindre la CGTU.
Ils élisent, comme secrétaire de leur nouvelle Union départementale, une femme, institutrice à Aubusson, Adrienne Montégudet. Ce choix était moins surprenant qu’il n’y paraît à première vue.

La scission syndicale CGT/CGT Unifiée était sous l’influence de la rupture politique décidée au Congrès de Tours en 1920. Ceux des syndicalistes qui avaient adhéré au nouveau parti communiste ne trouvaient pas leur place dans une confédération à qui ils reprochaient ses positions nationalistes et militaristes pendant la guerre, son manque de combativité face au patronat, ainsi que ses liens avec le parti socialiste. La nouvelle secrétaire présentait toutes les garanties quant à ses options de classe.

Née en 1895, Adrienne Valdant s’était mariée en 1908 avec un collègue enseignant, Léon Montégudet, fondateur du syndicat CGT des instituteurs dans la Creuse. Il avait pris la tête de la riposte quand le gouvernement avait prétendu interdire aux enseignants le droit de se syndiquer. Membre du parti socialiste SFIO, il était reconnu comme un éducateur politique de valeur. Il fut de ceux qui optèrent pour l’adhésion à l’Internationale communiste, mais il ne pu lui-même s’inscrire au nouveau parti. Atteint de la tuberculose au cours de l’année 1920, il mourut quelques mois après.

Adrienne, sans être déléguée, assiste semble-t-il au congrès de Tours. Convoquée quelques temps après par l’Inspecteur d’Académie, elle revendique avec force son droit à l’action politique se refusant à n’être, parce que fonctionnaire, qu’une citoyenne diminuée. Persistant dans ses engagements, elle anime l’action antimilitariste, dirige les Comités syndicalistes révolutionnaires, participe à la commission féminine de la CGTU.

Ayant évité de peu la révocation, elle eut tout de même à subir une censure, et d’autorité, le préfet la fit muter de son école d’Aubusson à celle de la toute petite commune de Jalesches, quelque part entre Boussac et Guéret.

Bien sûr, elle fut vite soupçonnée quand l’administration découvrit, effarée, les activités subversives de la directrice de l’école d’Arrènes, commune creusoise proche de Laurière.

Jeanne Etheve, en effet, avait été jusqu’alors une enseignante bien notée, jugée professionnellement compétente, irréprochable dans son comportement, bénéficiant de la confiance des parents qui la connaissaient depuis son enfance, puisque née dans la commune, elle avait succédé à sa mère dans l’école même du petit bourg.

Et voilà qu’au hasard d’une information maladroitement publiée dans un journal, le scandale apparaît : la directrice irréprochable est la correspondante pour la Creuse du Secours rouge international, organisation qui apporte son soutien financier et moral aux militants politiques emprisonnés et à leur famille. Elle a même correspondu avec l’un d’entre eux, agitateur communiste aux Carrières de Maupuy ; elle a dénoncé par lettre et par tract la mollesse du gouvernement face à des gens d’Eglise, détracteurs de l’école laïque. Elle soutient les actions antimilitaristes, elle adhère à la CGTU et au parti communiste.

Le ministre de l’Instruction Publique et celui de l’Intérieur furent informés par les soins du commissaire de police, de l’Inspecteur d’Académie et du Préfet que Jeanne Ethève s’était naïvement laissée manipulée par Adrienne Montégudet. Il fut donc décidé de continuer à surveiller l’institutrice d’Arrènes, y compris lors ses déplacements pendant les vacances. Faute de preuves, une comparution devant le juge pourrait obtenir des aveux, a suggéré l’Inspecteur …

1927 : la fermeture des mines de Lavaveix entraîne la disparition de l’Union départementale CGTU de la Creuse, regroupé dans une très large Union régionale.
C’est probablement quelque temps après cette réorganisation qu’Adrienne Montégudet, devenue la compagnonne d’un collègue d’origine italienne, Ramoni, militant de l’Internationale des travailleurs, partit avec lui pour l’URSS.
Elle donnera des cours au lycée français de Moscou, et participe à la publication d’ouvrage soviétiques en langue française.

Après que Ramoni se fut séparée d’elle, Adrienne revient en France, ayant en charge la fille de son ex-compagnon, qu’elle avait de fait adoptée.

C’est à son tour qu’elle fit part à Jeanne Ethève des inquiétudes qui lui sont posées, à partir de son expérience de vie en URSS.
Redevenue institutrice à Jalesches, elle s’intéresse au monde paysan, cherchant à organiser la syndicalisation des ouvriers et domestiques des fermes, de fait un véritable sous-prolétariat, et envisageant, au niveau de nouvelles structures, la création d’une coopérative agricole.

Suite à deux passages en URSS, dans les années 20-30, elle fait, à son retour, un rapport alarmant devant ses collègues sur la misère croissante de la population en nourriture, en vêtements, sur l’incohérence de l’équipement industrielle et de la construction des logements, sur la violence de la répression policière et la fréquence des condamnations à mort. Elle avait sans doute rencontré en URSS des opposants trotskystes au pouvoir stalinien. Est-ce à cause de cela qu’elle aurait eu à subir, avant de pouvoir sortir de l’URSS, une fouille au corps particulièrement humiliante ?

Revenue en Creuse, elle rompt avec le parti communiste mais continue de militer à la CGTU. Elue au conseil syndical, elle est chargée des questions de la réunification CGTU/CGT et du problème de la paix.

En 1936, l’année du Front populaire et des grandes grèves ouvrières, elle habite Marseille.
Ayant pris contact avec le mouvement anarchiste, elle devient secrétaire des femmes libertaires de la ville et s’occupe très concrètement de l’hébergement de réfugiés politiques italiens et espagnols.

Pour établir le contact avec les groupes anarchistes armés en guerre contre Franco, elle va résider à Biarritz.

La guerre la fait revenir vers les Alpes maritimes où elle prend en charge des familles tchèques réfugiées. Elle fait l’école aux enfants et assure un rôle d’assistante sociale pour les rapports avec l’administration.

Elle revient en Creuse pour y cacher des enfants juifs de nationalité tchèque, au château du Theil, à Saint-Agnan près de Crocq, à la limite entre le Puy de Dôme et la Corrèze. Elle déplacera ensuite sa colonie près de Bayonne.
C’est dans cette ville qu’elle meurt, quelques années après la Libération.

Jeanne Ethève, quant à elle, quitte le Limousin en 1928, pour aller enseigner en banlieue ouvrière parisienne.

On l’y retrouve militante dans la fédération syndicale CGTU de l’enseignement, à l’Union des Femmes contre l’impérialiste ainsi qu’au parti communiste. Elle s’affirme clairement pro-soviétique.

L’administration lui infligea des sanctions et elle dut subir, pour motif disciplinaire, une mutation.
Le gouvernement de Vichy lui imposera, dès 1941, une mise à la retraite anticipée.
Elle profitera de ce temps libre pour s’engager avec son amie Danielle Casanova dans un mouvement de résistance urbaine, animée par le parti communiste clandestin.

A la Libération, elle reprend ses activités syndicales et politiques …

Elle mourut, très âgée, en 1981.

Sources : Tome 37 du Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français (Maitron) Témoignages recueillis en Creuse

Correspondant·e IHS Pour améliorer la communication entre l’IHS fédéral, les structures et leurs adhérent·es, il est proposé que chaque organisation désigne, sur la base du volontariat, un ou une correspondante. La tâche de ce ou cette correspondante, en lien direct avec l’IHS, sera simplement de s’assurer que les informations soient bien transmises dans les deux sens, c’est-à-dire d’une part de l’IHS vers les différentes structures et leurs adhérent·es et d’autre part des structures vers l’IHS.

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La FERC et ses organisations s’exposent !

L’IHS fédéral supervise la réalisation d’une exposition dont l’ambition est de présenter le maximum d’organisations de la FERC. L’idée générale est de présenter les origines de chaque organisation, les points clés de son histoire et bien sûr les conquêtes syndicales, qu’elles soient en terme de mission de service public (transformation sociale) ou en terme d’emploi, statut et conditions de travail.

Dans ce cadre, l’IHS propose son aide à chacune des organisations en réalisant la mise en page et la reprodution des différents panneaux. Chaque organisation est donc invitée à fournir des documents d’archives (tracts, photos, bulletins, etc.) et un texte d’environ 1500 signes. Quelques panneaux en cours de réalisation seront présentés lors du 13ème congrès de la FERC qui se déroule en octobre 2019.

Chaque organisation pourra ainsi s’inspirer de ces panneaux pour rédiger le texte et choisir les illustrations de son panneau. Enfin, sachez que ces panneaux seront réalisés sur PVC rigide au format A0 (1 189 mm × 841 mm), ils pourront donc également être reproduits aux formats classiques A4 et A3.